Historique

Tout commence en 1812 au quai St Léonard à Liège, avec la construction de la première sucrerie industrielle. Durant les décennies qui suivent, plusieurs sucreries voient le jour en Wallonie. Mais c’est entre 1850 et 1880 que l’industrie sucrière démarre réellement, avec la construction de nombreuses usines en Hainaut et en Hesbaye. Ainsi, si on recensait 119 ha de betteraves en Hesbaye en 1846, on en compte 5251 en 1910 !

Hélas arrive la guerre mondiale, qui entraîne un arrêt partiel de la production. Au sortir de la guerre, la production reprend et les premiers syndicats betteraviers voient le jour en 1920, notamment à Ecaussinnes, Wavre et Villers-l’Evêque. Ce n’est que le début de l’histoire des associations de planteurs de betteraves. En 1937 en effet, suite à la convention de non-concurrence adoptée par les différents industriels du sucre, répartissant la clientèle en 3 régions de production, les Comités de Coordination du Hainaut, de Hesbaye et de Flandre sont créés. Après de longues négociations, ils s’uniront finalement en 1965 pour former la Confédération des Betteraviers Belges qui les représentera dès lors au niveau européen.

Entre-temps, la production est régulée par l’état belge, via l’instauration, dès 1950, du contingentement national, qui fixe quantité à produire et prix. En 1968, suite à la mise en place de la Politique Agricole Commune (PAC), des quotas de production de sucre sont instaurés temporairement dans les pays membres la future Union Européenne. En 1974 puis 1981, ces quotas sont reconduits et augmentés, de sorte qu’un emblavement record de 139 561 ha est atteint en Belgique en 1981 ! À 7 reprises depuis lors, la production belge de sucre blanc a dépassé le million de tonnes. C’est l’apogée de la betterave : première culture industrielle, elle garantit la rentabilité des fermes.

Parallèlement, un processus de concentration industrielle se met en marche et le nombre de sucreries diminue petit à petit. En 1990, une dernière usine est construite dans le Tournaisis, à Fontenoy. A l’occasion de cette construction et suite au rachat de la Raffinerie Tirlemontoise par le groupe allemand Südzucker, les associations de planteurs instaurent la participation financière dans l’industrie betteravière.

ISCAL Sugar sa est créé en 2003 par le Groupe Sucrier, et sera désormais le seul industriel du sucre à se partager la production betteravière belge avec la Raffinerie Tirlemontoise.

Avec la réforme de la PAC de 2006, arrivent des années noires pour le secteur betteraves-sucre : la diminution du quota et du prix minimum engendrent une grande perte de rentabilité de la culture de la betterave et de l’industrie sucrière. 2 des 4 sucreries wallonnes, Brugelette et Hollogne-sur-Geer, ferment leurs portes définitivement. En conséquence, la durée des campagnes de récolte augmente, imposant aussi aux betteraviers de nouvelles contraintes agronomiques.

Suite à cette restructuration et à la régionalisation du Ministère de l’Agriculture en 2001, les betteraviers wallons décident en 2009 d’adapter leur structure en créant l’ABW, l’Association des Betteraviers Wallons.

Entre 2011 et 2016, le ciel est un peu plus clément au-dessus des champs de betteraves, et les trois sucreries belges (Fontenoy, Longchamps-Wanze et Tirlemont) tournent à pleine capacité. Suite à la contraction de la production en Europe et la progression de la demande sur le marché mondial, le cours du sucre a atteint des niveaux très élevés, permettant aux betteraviers, suite aux négociations avec les sucriers, de retrouver un revenu plus décent.

Mais l’histoire se répète, tout comme les campagnes betteravières. A peine remis d’une douloureuse réforme, les betteraviers ont dû à nouveau faire face à une réforme de la PAC, soufflant la fin du régime des quotas et une diminution sensible des aides compensatoires obtenues lors de la réforme de 2006 suite à la diminution du prix minimum de la betterave.

Le régime des quotas a pris fin avec la clôture de la campagne sucrière de 2016-17, le 30 septembre 2017. A partir de là, c’est véritablement une nouvelle ère qui s’est ouverte, avec une concurrence accrue entre groupes sucriers (européens entre eux mais aussi non-européens). Toute l’Europe a emblavé plus de surface en 2017 et s’en est suivi une récolte record ! Les marchés étaient inondés de sucre aussi bien sur le marché Européen que mondial. Et alors qu’on croyait que le prix du sucre ne descendrait jamais en-dessous de 404 €/t, il a atteint le prix record vers le bas jusqu’à atteindre sur le marché communautaire 314 €/t en décembre 2018.

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L’arrêt quotas a mis fin au prix minimum et les industriels en ont profité pour changer une partie des garanties que les producteurs avaient. Les prix des betteraves sont descendus bien en-dessous de ce que les producteurs pouvaient assumer pour couvrir leur coût de production. Du côté industriel, des pertes ont aussi été engendrées dans beaucoup de sucreries en Europe. En 2021, les surfaces sont revenues à un niveau équivalent à 2016 alors qu’avec l’arrêt des quotas, elles avaient été augmentées de 20 %.

Aujourd’hui pour la première fois depuis 5 ans, les bonnes perspectives annoncées semblent être réelles et les fabricants vendraient leur sucre à plus de 600 €/t; une aubaine pour tout le secteur qui ne s’est pas encore remis de l’arrêt des quotas et qui craint une nouvelle crise avec l’augmentation des coûts de production : du gaz pour les industriels, des engrais et du fuel pour les planteurs.

Sources :

Association des Betteraviers Wallons, 2022. Données internes.

Fédération des Planteurs de Betteraves de Hesbaye, 1977. Cinquantième anniversaire 1927-1977. 32p.

Bruneel, C., 1988. Hesbaye Brabançonne et pays de Hannut. Centre d’histoire de l’architecture et du bâtiment, UCL, Belgique. Pp 60-73.

Le gîte Canin, 2010. Le petit train « Zaman ». http://www.gite-canin.be/Zaman.htm, 09/08/2012.